Pensées vagabondes

à Kenneth White

scruter l’essentiel
continuer à écrire
la longue route
des uns et des autres
jusqu’au bout de l’océan Arctique
écrire leur progressive évanescence
sous des tonnes de déchets
plastiques

et je me rappelle ces mots
de Kenneth White :

“dans le ciel
habité par le vent et les ailes
un espace sans nom
et la mer lointaine
qui cogne et retentit dans l’âme
avec puissance et splendeur”

tandis que mes semelles
écrasent les coquillages vides
le souffle du vent me paralyse
j’entends claquer les vagues
contre les falaises
— murailles immémoriales
de la mer Celtique

la marche continue à nourrir
une certaine
réalité
alors je m’enfonce dans ce réel
je m’évade
sur les sentiers
d’une vie ardente

j’ai vu un arbre si grand et si épais
que je ne voyais pas sa chevelure
est-ce que les arbres
peuvent être atteints
de la maladie d’Alzheimer
ainsi oublier
au bout du ciel
la profondeur de leur racine

s’ils perdaient la mémoire
ils oublieraient qu’on les coupe
à la racine
et notre présence
et cette fatalité que l’on porte en nous
tout en haut des cimes

les pierres nous scrutent
figées dans leur silence intime
ne pouvant rien faire d’autre
que de nous laisser devenir

aveugles.

est-ce que les montagnes sont des miroirs
et reflètent ce qui nous anime
comme une envie secrète de vouloir
comprendre l’infini

est-ce que les feuilles d’automne
virevoltent toujours
est-il possible d’écrire des poèmes
courts et incisifs
sur les feuilles orange
d’une seule et même saison

éternelle.

pourrions-nous offrir des ailes
à nos frères
qui traversent la Méditerranée
on leur prescrit des anxiolytiques
pour oublier
mais ils n’oublieront jamais
que parfois l’on traite les animaux
avec plus de philosophie

la poésie donne des ailes
mais parfois elle est impuissante
face aux aberrations des puissants
il faut continuer à lire les poètes
terreau fertile et sacré
qui nourrit cet élan vital
si nécessaire à notre âme

est-ce que les mots aspirent
ce que l’émoi inspire en nous
Ce que la mort expire
Sur des champs brûlés par la haine

autour du vent
des molécules
en chair et en os
de la cendre
et une route unique
pour continuer d’avancer
vers des rêves un peu obscurs
puis progressivement vers l’aube
Se lève dans les failles de l’espace
et les glissements de temps
une douce luminescence
réfléchissant la lumière du soleil
sur les rivages rouge sang
de la mer Océane

Laisser un commentaire

Pin It on Pinterest